Critique ciné : The Voices et interview de Marjane Satrapi

Très belle invitation que celle d’hier soir pour la projection de The Voices, le dernier film de Marjane Satrapi (Persepolis, Poulet aux prunes, The Prophet…), suivi d’un questions/réponses en présence de Marjane Satrapi et du monteur Stéphane Roche.

Synopsis : Jerry vit à Milton, petite ville américaine bien tranquille où il travaille dans une usine de baignoires. Célibataire, il n’est pas solitaire pour autant dans la mesure où il s’entend très bien avec son chat, M. Moustache, et son chien, Bosco. Jerry voit régulièrement sa psy, aussi charmante que compréhensive, à qui il révèle un jour qu’il apprécie de plus en plus Fiona – la délicieuse Anglaise qui travaille à la comptabilité de l’usine. Bref, tout se passe bien dans sa vie plutôt ordinaire – du moins tant qu’il n’oublie pas de prendre ses médicaments…

Et c’est bien là que se trouve le fond du problème, Jerry est psychotique et entends des voix, celles de son chien Bosco et de son chat Mr. Moustache et vit dans un monde où tout lui paraît parfait, quand il ne prend pas ses cachets. Ses cachets le font effectivement revenir à la réalité, une réalité sombre et noire dans laquelle Jerry ne supporte pas de vivre et dans laquelle son chien et son chat ne parlent pas… Un soir, alors qu’il rentre chez lui après une soirée banale dans son restaurant préféré, Jerry croise sur sa route la belle Fiona de la compta (Gemma Arterton) en panne de voiture sur le bord de la route. Il la raccompagne alors chez elle, mais le trajet ne se passera pas tout à fait comme prévu… Ils sont victimes d’un accident de voiture avec un cerf et la suite des événements, incontrôlés au départ, va bouleverser quelque peu la vie de Jerry pour notre plus grand plaisir mais tout le monde ne pourra pas en dire autant…

Comédie horrifique, comme l’a très bien qualifié Marjane Satrapi, The Voices nous emmène dans un film haut en couleurs, Marjane Satrapi peintre à l’origine a une relation avec les couleurs toute particulière et chacun de ses films se caractérise par un univers de couleur propre. Mais The Voices est aussi terrifiant puisque ce jeune homme, Jerry, à qui l’on donnerait le Bon Dieu sans confession se révèle être un loup dans une bergerie. Qui plus est, une très belle bergerie puisque servie par Anna Kendrick (Twilight, In the air,…) qui joue Lisa des livraisons et Ella Smith qui tient le rôle d’Alison de la paye, elles aussi amies avec Fiona, ce qui pourrait bien causer leur perte…

Je n’en dirai pas plus sur le film en lui-même qui perdrait alors tout son charme. Ce film est vraiment sympa et l’univers dans lequel il baigne révèle à quel point le projet a été travaillé, peaufiné et amélioré tout au long de sa genèse, de l’écriture du scénario jusqu’au montage final. A la fois drôle et parfois dérangeant, le travail de cadrage qui suggère plus qu’il ne montre, Marjane Satrapi nous parlait de style gore pudique à juste titre, font de ce film une belle réussite. Ryan Reynolds campe ici à la perfection un tueur en série pour lequel on se prend d’affection dès les premières images sans se douter du monstre qui sommeille en lui et de ce qu’il a pu vivre dans son enfance. Assez loin des rôles qu’il a pu avoir par le passé (Green Lantern, Blade Trinity, La Proposition,…) l’acteur est tout simplement impressionnant dans ce rôle.

L’interview de Marjane Satrapi en quelques mots et anecdotes :

Marjane Satrapi n’en est pas à son coup d’essai avec ce film, bien que différent de ses autres réalisations. Pour ce film, Marjane Satrapi s’est entourée d’une équipe avec laquelle elle est coutumière de travailler et le résultat parle de lui-même. Il aura fallu 33 jours de tournage et près d’un an de montage et de retouche pour arriver au film que nous avons vu. Tournage dans une ambiance bon enfant ou tous apportent leur pierre à l’édifice. Tourner avec des animaux n’a également pas été une mince affaire, autant le chien était doux et facile à gérer, autant le chat était aussi fourbe à diriger qu’il ne l’est dans son « rôle » à l’écran.

Les techniques utilisées pour filmer The Voices sont des techniques « anciennes » et le recours aux effets spéciaux est très limité, on est loin des films américains à gros budget mais le résultat est tout aussi bluffant et montre une certaine ingéniosité de la part de l’équipe de réalisation.

Je dirai pour conclure que Marjane Satrapi a vu et tourné ce film comme un peintre aborderait une peinture et où tous les plans sont une œuvre à part entière, chaque plan est souligné par une lumière et une couleur qui lui est propre et où les jeux de lumière sont omniprésents pour nous plonger encore plus dans l’état d’esprit des acteurs et leurs émotions.

The Voices est clairement une belle réussite et mérite que l’on parle de lui. Une belle comédie, car oui c’est bien une comédie, baignée d’horreur et d’un peu de gore pour le plus grand bonheur des spectateurs que nous avons été. Des acteurs judicieusement choisi, un Ryan Reynolds prodigieux, tout aussi touchant que machiavélique, un chien adorable accompagné d’un chat détestable, en qui tous les propriétaires de chat retrouveront un peu du leur. Un montage impeccable et des plans travaillés dans les moindres détails, aucun doute sur le succès de ce film.

Je vous invite encore une fois à sortir de chez vous, foncer dans les salles obscures dès le 11 mars prochain et vous délecter de cette comédie horrifique.